Article N° 8239
VACCINATION HEPATITE B
États-Unis : fin annoncée de la vaccination universelle des nouveau-nés contre l’hépatite B
Abderrahim Derraji - 08 décembre 2025 08:10Pour la première fois depuis plus de trois décennies, les États-Unis s’apprêtent à abandonner la vaccination systématique des nouveau-nés contre l’hépatite B. Cette politique, introduite en 1991 et soutenue par l’OMS, a permis de réduire de manière spectaculaire l’incidence de l’hépatite B chez les jeunes Américains.
Cette décision fait suite au vote d’un comité d’experts entièrement remanié par Robert Kennedy Jr., figure majeure du mouvement antivaccin et actuel ministre de la Santé de l’administration Trump. Le 5 décembre, ce nouvel ACIP (Advisory Committee on Immunization Practices) a décidé, par huit voix contre trois, de cesser de recommander la première dose du vaccin contre l’hépatite B dans les premières heures de vie pour les bébés dont la mère a été testée négative. Une décision applaudie par Donald Trump, qui y a vu une « très bonne décision » sur son réseau Truth Social. Mais pour les soignants, c’est une mesure incompréhensible, dangereuse et idéologique. Les associations professionnelles estiment que l’abandon de la vaccination universelle mettrait en danger des nourrissons vulnérables, dans un système où le dépistage maternel reste imparfait et où le risque de contamination par l’entourage ne peut être écarté.
Les États-Unis avaient pourtant choisi la vaccination généralisée précisément parce que les stratégies ciblant uniquement les enfants nés de mères positives avaient montré leurs limites. Avant 1991, des milliers d’enfants contractaient l’hépatite B sans que l’origine ne soit identifiée. Après l’introduction de la vaccination universelle, les infections infantiles ont chuté de façon spectaculaire, au point d’être proches de l’éradication.
L’hépatite B n’est pas une infection bénigne : elle peut entraîner de graves atteintes du foie, dont la cirrhose et le cancer hépatique, et peut toucher un enfant dès sa naissance. Les scientifiques s’inquiètent aujourd’hui d’un possible retour en arrière. Cette décision intervient dans un contexte où les taux de vaccination américains reculent depuis la pandémie, favorisant déjà le retour de maladies que l’on croyait sous contrôle, comme la rougeole.
Plus préoccupant encore, plusieurs signaux laissent penser que ce vote ne serait qu’une première étape dans une stratégie plus large visant à restreindre l’accès aux vaccins.
Face à cette décision, plusieurs États dirigés par des démocrates, comme la Californie, New York et le Massachusetts, ont annoncé qu’ils ne tiendraient pas compte des nouvelles recommandations fédérales. Certaines institutions scientifiques, comme l’American Academy of Pediatrics, préparent leurs propres recommandations pour garantir la continuité des protections vaccinales.
Même au sein du camp républicain, la décision fait débat. Le sénateur Bill Cassidy, lui-même médecin, a exhorté les autorités fédérales à renoncer à appliquer cette recommandation, qu’il juge contraire à l’intérêt public.
Car l’enjeu dépasse largement la sphère médicale. En effet, une fois adoptées, ces recommandations conditionnent le remboursement des vaccins par les assurances. Et dans un pays où une seule dose peut coûter plusieurs centaines de dollars, ces arbitrages vont impacter directement l’accessibilité vaccinale.
Cette décision marque un tournant historique, mettant fin à une politique de prévention avérée qui a permis de sauver de nombreuses vies. On ne peut qu’espérer que les prochaines décisions continueront d’être prises sur la base des preuves scientifiques, car il n’y a aucune place pour l’idéologie lorsque l’objectif premier est de préserver l’intérêt des citoyens.
Source : PharmaNEWS
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